OCTOBRE
Poème de Charles Trenet
Octobre a chaviré sa voile sur la mer
Et le temps se souvient de ses plaintes anciennes…
Miracle des saisons, la grève musicienne
Berce l’été qui meurt au fond d’un gouffre amer.
La Vigie, au soleil triste des promenades,
Jongle… et ses boules d’or attirent les bateaux,
Rentrera-t-il au port ce navire, malade
De fumer à son âge, si tôt ?
Je connais l’équipage. Il courait sur la plage
Chargé de soufre, au souffle des marais.
Marins, vous aviez mis vos beaux imperméables.
Le capitaine est mort, son ombre m’apparaît.
Au remous de vos cœurs, des chants mélancoliques
Étouffés de sanglots, de haines pour la Vie
Répondent au deuil qui descend sur la plage.
Mains coupées, feuilles mortes ; on a vu, ce soir-là,
Les oiseaux blancs qui changeaient de plumage,
Pétrels de mes quinze ans, aviez-vous donc mon âge
Quand vous passiez par là ?