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LE MAITRE ET LE TROUBADOUR
le 28 Juin 2002 - 07:57
Charles et la chanson par Pascal Halbeher

Sacha Guitry et Charles Trenet s’estimaient profondément. Sacha n’avait il pas déjà manifesté son admiration à Charles Trenet dès 1939, au sein de l’Académie Goncourt, puisqu’il avait été le seul à donner sa voix pour l’ouvrage du fou chantant Dodo manière ? Sacha Guitry à cette époque avait annoncé la nouvelle à l’intéressé en ces termes : « Mon petit, j’ai voté pour vous. ». On ne peut pas non plus oublier ce projet de comédie musicale Le dernier troubadour. Sur ce point nous y reviendrons plus loin…



LES RENCONTRES

Visiblement, leur première rencontre aurait eu lieu à l’A.B.C, salle de spectacle située boulevard Montmartre. C’était en 1938, Charles Trenet y débutait sa carrière solo après avoir triomphé durant plusieurs mois avec Johnny Hess dans un numéro de duettiste plus connu sous le nom de Charles et Johnny. Ce soir là, Charles est en coulisse, il est mort de trac. Timidement, il arrive sur scène et, de ses célèbres yeux bleus, il scrute l’avant scène. Son regard s’arrête au premier rang, il y reconnaît la chanteuse Mireille discutant avec Colette et Sacha Guitry. Cette soirée fut un triomphe pour le jeune Charles, dès le lendemain toute la presse en parle. Un nouveau nom de la chanson française était né…


Le 12 mai 1941 Sacha Guitry organisa un gala dans la salle de la Comédie Française, celui-ci ayant pour titre Le triomphe d’Antoine. Cette soirée était donnée au bénéfice du grand acteur André Antoine qui, à l’époque, vivait dans des conditions proches de la misère. Pour l’occasion toute une kyrielle des artistes les plus prestigieux de l’époque furent conviés. Parmi eux, un jeune homme de 28 ans, auréolé d’un chapeau mou. Il y chantera quatre chansons : Un rien me fait chanter , Papa pique et maman coud , Terre !  et La polka du Roi . Cette polka du Roi, Charles la composa en 1938 pour quelqu’un que Sacha connaissait bien, puisqu’il la créa pour divertir Max Jacob, qui à l’époque avait des problèmes de santé. Les autres connaissances en communs de Sacha Guitry et de Charles Trenet ne s’arrêtent pas là, puisqu’on peut y voir figurer : Jean Cocteau, Paul Léautaud, Paul Fort …


Il y a aussi cette anecdote relatée par Fernande Choisel dans ses mémoires (Sacha Guitry intime - éd. du Scorpion - 1957). La scène doit se situer au alentour de 1942. Elle nous rapporte ce dialogue entre Sacha, Charles et elle-même :
« - Vous vous souvenez, Madame Choisel, de Charles Trenet ? Quel merveilleux garçon, plein de vie et de chansons ! …
Oui je le revoyais, Charles Trenet, assis sur le tabouret de la loge de Sacha, à la Madeleine. Il triturait entre ses doigts le chapeau de ses premiers succès. Le patron l’interrogea :
- Alors, Charles ?… Qu’est ce que vous ruminez ? Allez, fredonnez nous la dernière !…
- Oh, non !… Elle n’est pas encore au point…
- Mais si, mais si… vite ! Ne faites pas mourir d’impatience cette brave Madame Choisel !
Charles Trenet se leva alors, il ouvrit les yeux gros comme des pièces de cent sous, les fit promener dans tous les sens et :
- Vous verrez vous même que ce n’est pas encore au point… Le soleil à rendez-vous avec la lune… Mais la lune ne le sait pas et le soleil attend…
(Le soleil et la lune - 1939) 
Il s’était transformé en quelques secondes… et c’est ainsi que Sacha et moi, nous eûmes le droit à la primeur de cette ravissante chanson « qui n’était pas encore au point ».


Un autre jour, Charles assiste à une représentation de N’écoutez pas Mesdames . Le dernier acte achevé, il demande à l’auteur-acteur de la pièce de lui en dédicacer le programme. Sacha lui écrira :
« Et bien ! Moi, je ne chante pas. »

Guy Luypaerts, qui fut longtemps le pianiste du chanteur, et qui de se fait, ne l’accompagnait pas qu’au piano, se souvient aussi d’une rencontre de Sacha Guitry et de Charles Trenet. Il avait été invité avec Charles à un gala de bienfaisance à Monte-Carlo, organisé par le prince Edouard, le père de Renier. Il nous dit ceci : « Tout se passe parfaitement bien et nous nous trouvons attabler avec Sacha Guitry, que Charles connaissait bien. Moi, j’étais plutôt impressionné !… » Qui ne l’aurait pas été à sa place !

Il apparaît, dans toutes leurs entrevues, que Sacha Guitry était toujours ravi de rencontrer Trenet. Leurs rencontres aboutissaient souvent sur des éclats de rire. Charles, qui possède des talents de clown et d’imitation et qui à l’époque se trouve dans une forme éblouissante, ne se gène donc pas. Sacha, adore Trenet.


LE DERNIER TROUBADOUR

C’est donc en 1943 que Sacha Guitry décide d’écrire une opérette avec comme acteurs principaux, Charles Trenet et Geneviève Guitry. Les musiques auraient dû en être composées par Trenet lui-même. Les représentations du dernier troubadour devaient débuter en octobre 1943 au théâtre Edouard VII.

Dans son livre Quatre ans d’occupations (Edition L'élan - 1947), Sacha Guitry nous fait part de la lettre qu’il adressa à la censure allemande. Elle est datée du 24 juillet 1943. Chose intéressante, il nous livre le résumé du scénario :

« Le premier acte se passe de nos jours. Un jeune homme et une jeune femme (lui et elle) ont réunit quelques amis à dîner et, tous, ils se demandent quand la guerre finira et comment elle finira.
Restés seuls tous les deux, elle et lui interrogent les esprits, en se servant d’une petite table.
Un instant plus tard, paraît la femme de chambre qui ne ressemble pas du tout à celle que l’on avait vue au début de l’acte. C’est une fée. Elle leur dit que pour être renseigné sur l’avenir, il n’est rien de mieux que de consulter le passé, ils y trouveront cent raisons d’avoir confiance dans le destin de la France. Elle leur conseille d’aller passer quelques heures à Paris en 1423-25 ou 29. Ils s’engagent, elle et lui, à conserver ce secret pour eux seuls, au cours de leur visite dans le passé, et à leur retour dans le présent.
Le deuxième acte se passe à Paris, dans une taverne, pendant l’occupation anglaise qui a durée cent ans et qui se termine enfin quand Jeanne d’Arc est apparue.
Lui, qui était chanteur dans une boîte de nuit à Paris, devient dans le passé le dernier troubadour. Il chante dans la taverne et elle, elle danse.
Pendant tout ce deuxième acte, il y a, bien entendu, des allusions sur la vie que mènent actuellement les Parisiens : difficultés à se procurer de l’étoffe pour se vêtir, des aliments pour se nourrir, etc.…etc.… marché noir, etc.… etc.…
Au troisième acte, ils reviennent du passé ayant compris bien des choses, plus intelligents, plus confiants dans leur pays et plus amoureux aussi l’un de l’autre. »


Entre l’envoi de cette lettre du le 24 juillet 1943, il faudra attendre jusqu’au 10 novembre de la même année pour qu’un refus du censeur allemand Lückt soit officialisé. En voici la traduction :
« Sacha Guitry à promis à M. Renaitour un ouvrage intitulé Le dernier troubadour pour être joué au théâtre Edouard VII. La pièce de Sacha Guitry serait un véritable régal pour les Gaullistes. Sous le nom de l’occupant on ne verrait que nous.
Lückt. »


A ce propos, Charles Trenet a une petite anecdote très croustillante. Il nous dit qu’il était avec Sacha Guitry, lorsque Lückt leur signifia verbalement son refus.
Est-ce exact ou est-ce une affabulation de l’artiste ? Peu importe… Puisque l’histoire est belle à raconter:
« J’assiste à l’entretien où le gradé nous signifie cette décision. Sans manifester sa déconvenue, Sacha s’exclame froidement :
- Eh bien mon jeune ami, j’en référerai directement à votre supérieur, le Docteur Goebbels.
Puis se drapant dans un immense cache-nez rouge, il sort sans ajouter un mot. Je le suis et dès que nous nous retrouvons à l’abris des oreilles indiscrètes, je lui demande s’il connaît le Dauphin de Hitler.
- Pas du tout ! Me répond il. »


A cause de la censure, Le dernier troubadour ne vit jamais le jour. On sait seulement que Sacha Guitry se servira de quelques passages du scénario pour son film Si Paris nous était conté. Du coté de Charles Trenet, il en subsistera une chanson portant le même titre que la comédie musicale, qu’il enregistrera en 1947.


DES GOÛTS ET DES COULEURS

On peut aussi être surpris par certains points communs réunissant les deux artistes. L’un comme l’autre aimait l’art (peinture, littérature, etc …). Ils avaient, l’un comme l’autre, le don de la caricature. Pour preuve, les deux autoportraits au début de cet article.

Charles Trenet collectionnait moins, mais il possédait aussi des tableaux de Maître et autres objets de valeurs.

Aux périodes les plus sombres de la guerre, ils furent tous deux accusés d’appartenir à la religion israélite, puis devinrent collaborateurs à la libération. Ces immondes accusations lancées par de petites gens envieux et jalousant leurs carrières, furent sans doute colportées pour les mêmes raisons. Ils étaient talentueux, riches et célèbres.

On a aussi parlé d’eux pour l’habit vert. Mais tous deux furent laissés à la porte de l’Académie Française. C’est sans doute ça le génie… Ils étaient trop modernes pour les institutions.

Ils pratiquaient également les mots d’esprit. Sacha Guitry déclara à un journaliste en 1956, alors qu’il était très malade :
« Mes médecins me font prendre les médicaments qui ont sauvé le pape. J’attends les visions ! »
Charles Trenet après sa première attaque cérébrale et après de longs mois de rééducation, rétorqua à quelqu’un qui lui signifiait qu’il marchait de mieux en mieux : « Oui ! C’est la marche funèbre. »

Jusqu’à la fin de sa vie, Sacha Guitry estima Trenet. Il fait encore une allusion au fou chantant dans l’une des émissions radiophoniques des Cent merveilles. Celle ci s’intitulant Les mains et dans laquelle il parle de l’utilité des mains d’un homme dans différentes disciplines. Il dit :
« …Il faudrait enregistrer les mains de Charles Trenet pendant un de ses refrains les plus célèbre… »

Enfin Lana Guitry nous apprend dans son livre de mémoire, que Sacha aimait particulièrement écouter la chanson L'âme des poètes  de Charles Trenet, évidemment. Ce même Trenet qui, le jour de la mort du maître, enverra un télégramme à sa veuve :
« J’ai perdu un parent et je le pleure. »

Charles Trenet qui possédait en plus de tous ses autres talents, celui de l’imitation, avait dans ses favoris celle de Sacha Guitry. Quel dommage qu’aucun enregistrement ne demeure aujourd’hui.

A présent, le dernier troubadour n’est plus. A-t-il retrouvé le maître au royaume des cieux ? Peut-être sont-ils entrain de s’esclaffer dans d’immenses fou rires. Et puisque là-haut la censure n’existe pas, sans doute sont ils déjà prêts pour la première représentation d’un spectacle nouveau…
Tendez l’oreille et écoutez… Entendez-vous ce refrain?




C’est le dernier troubadour,
C’est le dernier cœur bohème,
Celui qui chante le jour
Et puis dont on rêve souvent la nuit
Quand il vient et vous dit : « Je t’aime,
Embrasse-moi, chérie.»…



Le dernier troubadour - 1947 





 
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